Opérations Forestières

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Feux de forêt : « Je perds 50 000 $ par semaine »

22 juin, 2023  par Guillaume Roy. Initiative de journalisme local



Les feux de forêt génèrent de véritables casse-têtes pour les entrepreneurs forestiers et sylvicoles. Pour Réjean Girard, copropriétaire de l’entreprise forestière Lemieux et Girard, le manque à gagner s’élève à 50 000 $ par semaine.

« Ça n’a plus de bon sens, lance le forestier. Ça fait deux semaines et demie qu’on est arrêté et on ne sait pas quand on va pouvoir recommencer ».

L’équipe de l’entrepreneur qui récolte sur la zec des Passes devait recommencer à bûcher lundi matin, mais le gouvernement a décrété une nouvelle interdiction d’accès en forêt sur la majorité de ce secteur.

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Il craint également de perdre de la main-d’œuvre si l’arrêt se poursuit trop longtemps. « On a peur de perdre nos hommes qui pourraient aller travailler ailleurs où c’est possible de bûcher », ajoute-t-il.

Réjean Girard n’est pas le seul à vivre une situation financière difficile à cause des feux de forêt. Les entreprises petites et grandes doivent composer avec des pertes en attendant de voir comment le gouvernement, qui a dit vouloir aider les entreprises du secteur, interviendra.

Les coopératives forestières aussi touchées

La Coopérative forestière Girardville, qui fait de la récolte, mais aussi du reboisement et des opérations de sylviculture, ne fait pas exception. La récolte a été arrêtée de nouveau à compter de lundi midi et pour l’instant, un secteur demeure accessible pour faire du reboisement près de Saint-Thomas-Didyme, remarque le directeur général de l’entreprise Stéphane Gagnon.

« Ç’a aurait été possible de rattraper une semaine de travail, mais là ça fait presque trois semaines de perdues », dit-il.

Au printemps, les entreprises forestières engrangent de grosses dépenses pour réparer la machinerie et pour préparer les camps forestiers, par exemple. « C’est une période où il y a beaucoup de dépenses, mais là il manque de liquidité, parce qu’on ne peut pas réaliser nos contrats », soutient Stéphane Gagnon, ajoutant qu’il y aura un gros manque à gagner à la fin de l’année, alors que les frais fixes demeurent les mêmes.

Difficile pour les activités saisonnières

Marco Sylvain, propriétaire de Foresco, qui opère neuf pelles mécaniques pour faire de la préparation de terrain, abonde dans le même sens.

« On travaille à la grandeur du Québec et d’habitude, on peut trouver des endroits pour travailler, mais là, il y a des feux partout », estime-t-il, ajoutant que les pertes se comptent en dizaine de milliers de dollars par jour. Comme les activités de l’entreprise sont saisonnières, il sera encore plus difficile de rattraper les semaines perdues, d’autant plus que les feux pourraient perdurer encore longtemps.

Les entreprises sylvicoles sont aussi impactées. « On a déjà perdu au moins deux semaines de travail », soutient Louis-Philippe Naud, propriétaire de Nokamic, qui fait du débroussaillage et de l’entretien de plantation.

« Ça va représenter des pertes de revenus de près de 25 % du chiffre d’affaires », indique-t-il.

Ce dernier s’inquiète aussi pour ses travailleurs, qui en plus de perdre des revenus, pourraient ne pas se qualifier à l’assurance-emploi à la fin de la saison. « Certains d’entre eux ne reviendront pas parce qu’ils vont avoir trouvé un autre travail », croit-il.

Des investissements majeurs nécessaires

« On va devoir investir massivement au cours des 10 prochaines années pour reconstruire les forêts du nord », croit Fabien Simard, le directeur général de l’Association des entrepreneurs en travaux sylvicoles du Québec.

« On a vécu une année de feu extraordinaire et il faudra des moyens extraordinaires ».

D’une part, il faut lancer les opérations de récolte le plus rapidement possible, car chaque jour perdu représente d’énormes pertes. De plus, des compensations devront être versées aux entreprises pour qu’elles puissent survivre et payer leurs termes.

« Ça va prendre de l’aide pour passer à travers une année comme ça », remarque Stéphane Gagnon.

Réjean Girard espère bien avoir de l’aide lui aussi, même si les forestiers sont souvent les grands oubliés de tels programmes.

Alors qu’il a fallu près de 10 ans pour remettre en production le territoire du feu du lac Smokey, d’une superficie de 140 000 hectares, Marco Sylvain se demande comment on arrivera à en faire autant alors qu’on aura probablement 10 fois plus de superficies à traiter après les feux de cette année.


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